Exercice illégal de l’activité d’expert-comptable et conflit de qualifications
Il est fréquent qu’une personne poursuivie sous la qualification d’exercice illégal de l’activité d’expertise comptable soit également poursuivie sous les qualifications d’escroquerie et usurpation de titres.
Or la question d’un conflit de qualification doit se poser.
Il est rappelé que dans un arrêt de la Cour de cassation en date du 15 décembre 2021, n°21-81864, la Cour de cassation a été amené à formuler la règle suivante :
« L’interdiction de cumuler les qualifications lors de la déclaration de culpabilité doit être réservée, outre à la situation dans laquelle la caractérisation des éléments constitutifs de l’une des infractions exclut nécessairement la caractérisation des éléments constitutifs de l’autre, aux cas où un fait ou des faits identiques sont en cause et où l’on se trouve dans l’une des deux hypothèses suivantes :
- Dans la première, l’une des qualifications, telles qu’elles résultent des textes d’incrimination, correspond à un élément constitutif ou une circonstance aggravante de l'autre, qui seule doit alors être retenue ;
- Dans la seconde, l’une des qualifications retenues, dite spéciale, incrimine une modalité particulière de l’action répréhensible sanctionnée par l’autre infraction dite générale ».
L’étude des potentiels conflits de qualification doit être réalisée au regard des principes dégagés par la Cour de cassation.
Existe-t-il un conflit de qualification avec l'infraction d'usurpation de titres ?
L’infraction d’exercice illégal de l’activité d’expert-comptable a été créée par l’article 20 de l’ordonnance du 19 septembre 1945 portant institution de l’ordre des experts comptables.
Cet article vise expressément l’usage abusif du titre d’expert-comptable comme constitutif du délit.
L’exercice illégal de la profession d’expert-comptable implique que l’intéressé usurpe le titre qui l’autorise.
Pour admettre le cumul, et poursuivre en conséquence sur le fondement de l’usurpation de titres, il faudrait donc caractériser un fait d’usurpation qui ne soit pas le support de l’exercice professionnel.
Ce conflit de qualification doit être résolu en faisant application de la règle specialia generalibus derogant.
L’incrimination d’exercice illégal de l’activité d’expert-comptable doit ainsi prévaloir, et il apparaît que la qualification d’usurpation de titres, diplôme ou qualité doit être écartée.
Existe-t-il un conflit de qualification avec l'infraction d'escroquerie ?
Le fait de de réaliser des travaux comptables, d’user de la fausse qualité d’expert-comptable, ou d’éditer des documents comptables avec la mention d’opérations d’expertise comptable et de la qualité d’expert-comptable, sont des faits poursuivis sous la qualification d’exercice illégal de l’activité d’expert-comptable.
Des lors l’existence de ces seuls faits ne saurait suffire à entraîner la qualification d’escroquerie.
Le parquet doit là aussi impérativement démontrer l’existence de faits distincts.
En conclusions, lorsque le parquet engage des poursuites sous ces trois qualifications il apparaît souvent nécessaire de les contester.