Action en comblement de passif et démission du dirigeant
L’action en comblement du passif prévue aux articles L. 651-1 et suivants du Code de commerce n’est autre qu’une action en responsabilité.
Cette action est ouverte à l’encontre des dirigeants de personnes morales de droit privé soumises à une procédure collective. Lorsque le dirigeant est lui-même une personne morale, la ou les personnes physiques représentants permanents peuvent être poursuivies sans que la poursuite de la personne morale dirigeante ne soit exigée. Il en est de même des entrepreneurs individuels à responsabilité limitée.
Il peut s’agir aussi bien d’un dirigeant de droit qu’un dirigeant de fait, rémunéré ou non.
Le dirigeant poursuivi doit en outre être en fonction à la date d’ouverture de la procédure collective.
A défaut, sa démission doit être intervenue alors que la situation de la société était d’ores et déjà irrémédiablement compromise. La Cour de cassation a ainsi jugé que l’état de cessation des paiements doit exister à la date où le dirigeant a cessé ses fonctions (Cass. Com. 14 octobre 2008, n° 07-19.000). Il n’est toutefois pas nécessaire que le montant exact de l’insuffisance d’actif soit déterminé à cette date.
Attention, pour être invocable la cessation des fonctions doit être réelle. Aussi, un dirigeant qui se comporterait en dirigeant de fait pourrait être poursuivi pour des actes postérieurs à sa démission (Cass. Com. 15 mars 2005, n° 03-19.577).
La Chambre commerciale de la Cour de cassation a par ailleurs par arrêt du 16 juin 2021 (n° 20-15.399) rappelé que la responsabilité du dirigeant ne pouvait pas être retenue dès lors que sa démission n’était pas contestée et ce quand bien même elle n’aurait fait l’objet d’aucune publicité :
« Vu l'article L. 123-9 du code de commerce :
6. Selon ce texte, la personne assujettie à immatriculation ne peut, dans l'exercice de son activité, opposer aux tiers les faits et actes sujets à mention que si ces derniers ont été publiés au registre du commerce et des sociétés. Néanmoins, l'inopposabilité ne concerne pas les faits et actes qui mettent en jeu sa responsabilité personnelle sur le fondement de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
7. Pour condamner Mme [E] au paiement de partie de l'insuffisance d'actif, l'arrêt relève que M. [Q] s'est présenté pour le compte de celle-ci, désignée comme gérante, à l'audience ayant conduit à l'ouverture de la procédure collective, le 27 novembre 2009, que l'extrait Kbis de la société LFT établi au 29 novembre 2009 la mentionne comme en étant la dirigeante, et que le procès-verbal d'assemblée générale produit pour attester de sa démission le 30 octobre 2009 ne comporte pas le nom du dirigeant démissionnaire et n'a fait l'objet d'aucune publicité, de sorte qu'il n'est pas opposable aux tiers.
8. En statuant ainsi, alors que la démission de Mme [E] le 30 octobre 2009 n'était pas contestée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ».
Ce raisonnement peut également trouver à s’appliquer aux actions en responsabilité conduisant à la condamnation du dirigeant à une mesure de faillite personnelle ou à une interdiction de gérer.
En cas de poursuites, il pourra ainsi y avoir matière à contestation lorsque le dirigeant poursuivi a démissionné.