Est ce que l'obligation d'information annuelle s'applique aux cautionnement avec affectation hypothécaire ? (Cour de cassation, chambre civile, 2 juin 2021, n°19-20.140)
L’information annuelle est un argument souvent soulevé dans le cadre de la défense des personnes poursuivies en qualité de caution (voirhttp://www.avocats-desbosbarou.fr/blog/articles/moyens-de-defense-de-la-caution-dirigeante et http://www.avocats-desbosbarou.fr/blog/articles/jugement-rendu-par-le-juge-de-l-execution-pres-le-tribunal-de-grande-instance-de-lyon-du-19-novembre-2019-defaut-d-information-annuelle-de-la-caution-et-decheance-du-droit-aux-interets-induisant-une-supression-de-la-creance-de-1-677-793 )
Il est rappelé que l’article L313-22 du code monétaire et financier dispose :
« Les établissements de crédit ou les sociétés de financement ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.
La réalisation de cette obligation légale ne peut en aucun cas être facturée à la personne qui bénéficie de l'information.
Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette ».
Cette sanction est ainsi efficace : elle conduit à la déchéance du droit aux intérêts, ce qui a pour conséquence de réduire de façon importante la dette du débiteur poursuivi en qualité de caution.
Concretement les intérêts réglé depuis l'origine sont déduits du montant du capital restant dû.
La question de l’application de cette obligation d’information aux cautionnements avec affectation hypothécaires peut se poser.
La cour d’appel de VERSAILLES avait ainsi estimé, dans un arrêt du 28 mars 2019, qu’il y avait lieu de considérer que le débiteur avait consenti deux garanties distinctes : un cautionnement personnel et solidaire et une sûreté réelle consistant en l’affectation hypothécaire au profit de la Banque du bien saisi.
Dès lors la Cour d’appel considérait que la procédure était en lien avec la sureté réelle, s’agissant d’une saisie immobilière, il n’y avait pas lieu de faire application de la déchéance du droit aux intérêts, celle-ci étant réservée aux contrats de cautionnement.
Cette interprétation allait à l’encontre de la position de la Cour de cassation qui, dans des précédents arrêts, considérait que
« Si le garant a pris en plus de de l’affectation hypothécaire un engagement personnel de caution les deux garanties se cumulent et les dispositions protectrices de la caution s’appliquent (en ce sens Cour de cassation, 1ère chambre civile, 13 novembre 2002, n°00-12 .797 ; Cour de cassation, 1er chambre civile, 9 Novembre 2004, n°01-17.431 ; Cour de cassation, chambre commerciale, 21 mars 2006, n°05-12.864, Cour de cassation, 1ère chambre civile, 9 Janvier 2019, n°17-19.570)
La Cour de CASSATION, dans son arrêt du 2 juin 2021, a confirmé sa jurisprudence antérieure, cassant l’arrêt de la Cour d’appel de VERSAILLES, et précisant que « lorsqu’une même personne se rend caution personnelle des engagements d’un débiteur envers un établissement de crédit et lui affecte aussi un ou des biens en garantie hypothécaire de ces mêmes engagements, cet établissement lui doit l’information annuelle prévue par le dernier texte »
Cette position apparaît difficilement contestable.
L’affectation hypothécaire est un accessoire du cautionnement. Elle vient en sureté et garantie de ce dernier. Il est donc logique que le montant de la dette due au titre de cette sureté soit le montant de la dette due au titre du contrat de cautionnement. Or le montant de la dette due au titre du contrat de cautionnement se calcule en faisant application de l’article L313-22 du code monétaire et financier.