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Cabinet d'avocats à Lyon

Exercice illégal de la profession de banquier


La profession de banquier est une profession réglementée pour laquelle l’obtention d’un agrément est nécessaire (compétence partagée entre l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et la Banque centrale européenne).

Il est ainsi prévu à l’article L. 511-5 du Code monétaire et financier que :

« Il est interdit à toute personne autre qu'un établissement de crédit ou une société de financement d'effectuer des opérations de crédit à titre habituel.

Il est, en outre, interdit à toute personne autre qu'un établissement de crédit de recevoir à titre habituel des fonds remboursables du public ou de fournir des services bancaires de paiement ».

 

Le fait pour une personne physique ou morale d’exercer la profession de banquier et donc d’effectuer des opérations de banque dans les conditions précitées sans s’être soumis à cette formalité est constitutif de l’infraction pénale d’exercice illégal de la profession de banquier réprimée à l’article 571-3 du Code monétaire et financier :

« Le fait, pour toute personne, de méconnaître l'une des interdictions prescrites par les articles L. 511-5 et L. 511-8 est puni de trois ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende.

Le tribunal peut ordonner l'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions prévues par l'article 131-35 du code pénal ».

 

 

A. Constitution de l’infraction

 

Cette infraction pénale nécessite la réunion d’une condition préalable, d’un élément matériel et d’un élément moral.

 

1°/ Condition préalable

Au titre de la condition préalable, l’auteur des faits ne doit pas être titulaire de l’agrément permettant l’exercice de la profession de banquier.

Les opérations de crédit sont ouvertes aux établissements de crédit ou sociétés de financement tandis que la réception à titre habituel des fonds remboursables du public ou la fourniture des services bancaires de paiement (article L. 511-5 du Code monétaire et financier) ne sont ouvertes qu’aux établissements de crédit.

Par ailleurs, il est ici précisé que s’agissant des établissements de crédit, l’agrément est spécial ce qui signifie qu’une personne morale n’est pas agréée en tant qu’établissement de crédit mais au titre d’une des quatre catégories prévues par l’article L. 511-9 du Code monétaire et financier :

« Les établissements de crédit sont agréés en qualité de banque, de banque mutualiste ou coopérative, d'établissement de crédit spécialisé ou de caisse de crédit municipal.

Les banques peuvent effectuer toutes les opérations de banque.

Les banques mutualistes ou coopératives, les établissements de crédit spécialisés et les caisses de crédit municipal peuvent effectuer toutes les opérations de banque dans le respect des limitations qui résultent des textes législatifs et réglementaires qui les régissent ».

 

2°/ Elément matériel

S’agissant de l’élément matériel, la personne physique ou morale doit avoir accompli des opérations de banque (article L. 511-5 du Code monétaire et financier précité) :

  • Opérations de crédit ;
  • Réception de fonds remboursables du public ;
  • Fourniture de services bancaires de paiement ;

Et ce de manière habituelle pour les deux premières catégories.

 

  1. Opérations de crédit

 

L’opération de crédit caractérisant l’exercice de la profession de banquier est défini à l’article L. 313-1 du Code monétaire et financier :

« Constitue une opération de crédit tout acte par lequel une personne agissant à titre onéreux met ou promet de mettre des fonds à la disposition d'une autre personne ou prend, dans l'intérêt de celle-ci, un engagement par signature tel qu'un aval, un cautionnement, ou une garantie.

Sont assimilés à des opérations de crédit le crédit-bail, et, de manière générale, toute opération de location assortie d'une option d'achat ».

 

L’opération de crédit est également définie à l’article L. 311-1 6° du Code de la consommation :

« Opération ou contrat de crédit, un contrat en vertu duquel un prêteur consent ou s'engage à consentir à l'emprunteur un crédit, relevant du champ d'application du présent titre, sous la forme d'un délai de paiement, d'un prêt, y compris sous forme de découvert ou de toute autre facilité de paiement similaire, à l'exception des contrats conclus en vue de la fourniture d'une prestation continue ou à exécution successive de services ou de biens de même nature et aux termes desquels l'emprunteur en règle le coût par paiements échelonnés pendant toute la durée de la fourniture ».

 

Le crédit doit être à titre onéreux c’est-à-dire avec intérêts ou commissions. Le crédit gratuit n’est donc pas incriminé.

Pour être punissable, cette opération de crédit doit en outre avoir été accomplie de manière habituelle. La notion d’habitude est appréciée de manière particulière en matière d’opération de crédit. Ainsi la Cour de cassation retient que la réalisation de deux opérations ne suffit pas à caractériser l’habitude et qu’il doit être démontré l’existence d’une clientèle (Cass. Com. 31 mai 2011, n° 10-17.213, Cass. Crim. 17 octobre 2007, n° 07-14.443).

Exerce ainsi illégalement la profession de banquier, l’expert-comptable qui consent, sous le couvert d’une société de comptabilité dont il détenait la totalité des parts, à des clients ayant des besoins de trésorerie ou désireux de procéder à des acquisitions, des prêts d’argent, moyennant le versement d’intérêts à des taux proches de l’usure (Cass. Crim. 11 février 2009, n° 08-83.870).

A également été condamnée, une personne qui, dans le cadre d’un cercle de jeux clandestins, avait avancé de l’argent aux joueurs ayant perdu tout en assortissant les remboursements d’un intérêt (Cass. Crim. 14 décembre 2016, n° 16-80.059).

 

 

  1. Réception de fonds remboursables du public

 

Selon l’article L. 312-2 du Code monétaire et financier, il s’agit des fonds qu’une personne (autre qu’un établissement de crédit) recueille d’un tiers notamment sous la forme de dépôts, avec le droit d’en disposer pour son propre compte mais à charge pour elle de les restituer.

Les fonds déposés peuvent être des espèces, un chèque ou un virement.

D’autres hypothèses que le dépôt peuvent être envisagées et notamment l’émission de titre de créances.

L’article R. 312-18 du Code monétaire et financier précise que :

« Pour l'application de l'article L. 312-2, les émissions de titres de créance sont assimilables au recueil de fonds remboursables du public lorsqu'elles respectent les conditions et limites suivantes :

1° Ces émissions portent sur des titres de créance mentionnés au 2 du II de l'article L. 211-1, à l'exception :

a) Des titres subordonnés de dernier rang émis en application de l'article L. 228-97 du code de commerce ;

b) Des titres participatifs mentionnés aux articles L. 213-32 à L. 213-35 ;

c) Des autres instruments de dernier rang, mentionnés au b du 9° de l'article L. 613-31-16, dont le contrat d'émission prévoit qu'ils absorbent les pertes en continuité d'exploitation ;

d) Des titres dont le contrat d'émission prévoit qu'en cas de liquidation de l'émetteur ils ne sont remboursés qu'après désintéressement des créanciers privilégiés et chirographaires ;

2° Ces émissions ne sont réservées ni aux personnes fournissant le service de gestion de portefeuille pour le compte de tiers mentionné au 4 de l'article L. 321-1, ni à des investisseurs qualifiés au sens du 2 du II de l'article L. 411-2 ;

3° Pour les titres autres que les titres de créances négociables, la valeur nominale de chacun des titres est inférieure à 100 000 € ».

 

Le droit du réceptionnaire de disposer des fonds pour son propre compte permet de distinguer la réception de fonds public du mandat notamment.

La Chambre criminelle de la Cour de cassation a toutefois jugé que constituait le délit d’exercice illégal de la profession d’avocat, le fait pour des sociétés d’intervenir en tant qu’intermédiaire pour des placements financiers réalisés par des particuliers (Cass. Crim. 1er décembre 2004, n° 03-85.553) alors même que dans cette hypothèse les sociétés ne semblaient pas avoir la libre disposition des fonds.

Constitue de même ledit délit, le fait pour un individu d’avoir reçu de nombreux chèques d’entreprises du bâtiment employant des salariés en situation irrégulière sans les déclarer, avant de les retirer en espèces pour en remettre le solde à ses employés en paiement de leur salaire (Cass. Crim. 17 juin 2015, n° 14-80.977).

Pour être punissable, la réception doit en outre avoir été réalisée de manière habituelle, c’est-à-dire au moins à deux reprises.

En matière de trafic de stupéfiants, la jurisprudence retient parfois, lorsque la preuve du trafic n’est pas rapportée, l’infraction d’exercice illégal de la profession de banquier en raison l’existence des fonds transitant par le patrimoine de l’auteur des faits.

 

  1. Les services bancaires de paiement

 

Est également sanctionnée la fourniture de services bancaires de paiement par une personne autre qu’un établissement bancaire.

Selon l’article L. 314-1 II du Code monétaire et financier, constitue des services de paiement :

« 1° Les services permettant le versement d'espèces sur un compte de paiement et les opérations de gestion d'un compte de paiement ;

2° Les services permettant le retrait d'espèces sur un compte de paiement et les opérations de gestion d'un compte de paiement ;

3° L'exécution des opérations de paiement suivantes associées à un compte de paiement :

a) Les prélèvements, y compris les prélèvements autorisés unitairement ;

b) Les opérations de paiement effectuées avec une carte de paiement ou un dispositif similaire ;

c) Les virements, y compris les ordres permanents ;

4° L'exécution des opérations de paiement suivantes associées à une ouverture de crédit :

a) Les prélèvements, y compris les prélèvements autorisés unitairement ;

b) Les opérations de paiement effectuées avec une carte de paiement ou un dispositif similaire ;

c) Les virements, y compris les ordres permanents ;

5° L'émission d'instruments de paiement et/ ou l'acquisition d'opérations de paiement ;

6° Les services de transmission de fonds ;

7° Les services d'initiation de paiement ;

8° Les services d'information sur les comptes ».

 

La condition d’habitude n’est ici pas requise pour que les faits soient punissables.

 

 

3°/ Elément moral

 

L’exercice illégal de la profession de banquier est un délit intentionnel.

L’auteur des faits doit donc volontairement réaliser l’acte et avoir conscience qu’il viole le monopole bancaire.

La connaissance des règles bancaires est bien souvent déduite par les juges de l’expérience de l’auteur des faits, de son âge, de sa profession etc.

 

 

B. Répression

 

L’infraction d’exercice illégal de la profession de banquier est punie de 3 ans d’emprisonnement et de 375.000 euros d’amende pour les personnes physiques (article L. 571-3 alinéa 1er du Code monétaire et financier). La juridiction peut également ordonner l’affichage ou la diffusion de la décision prononcée.

Concernant les personnes morales, est encourue une amende de 1.875.000 euros ainsi que les peines complémentaires et notamment la dissolution, l’interdiction à titre définitif ou pour une durée de 5 ans au plus d’exercer directement ou indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales.

La tentative n’est pas punissable


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