La Cour de cassation est réticente à s’immiscer dans les rapports entre concurrents et pose des barrières à une reconnaissance trop systématique des la concurrence déloyale.
Ainsi il ne saurait y avoir de présomption de responsabilités et le demandeur doit prouver une faute du défendeur, qui peut être intentionnelle ou non intentionnelle, ainsi qu’un préjudice réel.
Cela a été justement rappelé dans un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 20 septembre 2011.
Dans cette espèce, trois anciens salariés d’une société de développement informatique, GEOCONCEPT, décident de créer une société exerçant le même type d’activité, ASTEROP.
Un an après, la société ASTEROP compte dans son personnel, outre ses créateurs, six anciens salariés de la société GEOCONCEPT.
La société ASTEROP décide alors de développer un nouveau logiciel de géomarketing.
La société GEOCONCEPT voit d’un très mauvais œil ce développement et fait procéder à des saisies contrefaçons de ce nouveau logiciel.
La société ASTEROP se défend alors en assignant à son tour la société GEOCONCEPT en contrefaçon.
GEOCONCEPT sollicite reconventionnellement des dommages et intérêts sur le fondement de l’action en concurrence déloyale en raison du débauchage du personnel qu’elle a subi.
La société GEOCONCEPT obtient gain de cause sur ce point devant la Cour d’appel de PARIS.
La Cour constate que 6 salariés ayant des responsabilités importantes ont quitté la société GEOCONCEPT pour rejoindre ASTEROP et que cela n’a pu que désorganiser GEOCONCEPT. Elle condamne dès lors ASTEROP à verser une indemnité de réparation pour cause de démarchage fautif.
La Cour d’appel de PARIS est censurée sur ce point.
La Cour de cassation rappelle qu’il ne saurait y avoir de présomption de responsabilité et qu’il convient de vérifier de façon concrète si le transfert des employés a entraîné une véritable désorganisation et non une simple perturbation.
Cela peut paraître étonnant tant la désorganisation semblait évidente.
Cependant, il appartient au demandeur de démontrer que cette désorganisation va au-delà de ce qui est prévisible ou normal.
Cette solution s’inscrit dans la droite ligne de la jurisprudence qui a déjà considérée que «la simple embauche dans des conditions régulières d’anciens salariés d’une entreprise concurrente n’est pas en elle même fautive» (Cour de cassation, chambre commerciale, 25 janvier 2000, n°97-21.210).
La Cour de cassation prend ainsi soin de privilégier à la fois les principes de liberté de la concurrence et de liberté de l’emploi du salarié.