Responsabilité d’une agence immobilière pour défaut de Conseil : jugement du Tribunal judiciaire de PERPIGNAN, Chambre 1 Section 1, RG 21/02005
Suivant acte sous seing privé en date du 24 juin 2019 les époux X ont signé un compromis de vente.
La rédaction du compromis a été réalisée par l’agence immobilière.
Lors de l’élaboration de l’acte de vente définitif le notaire a découvert qu’il était nécessaire de procéder à une mise en copropriété, refusée par le propriétaire voisin.
La rupture conventionnelle du compromis de vente est alors intervenue entre les parties.
La difficulté provenait du fait qu’entre la signature du compromis et l’acte de réitération les époux X avaient fait réaliser des travaux de menuiserie sur mesure pour un montant total de 20.975,36 €.
L’agence immobilière a refusé de prendre en charge ce préjudice.
Quelle était la faute de l’agence immobilière ?
La responsabilité de l’agent immobilier a un fondement délictuel à l’encontre de l’acquéreur, celui-ci n’ayant pas mandaté l’agent pour rédiger l’acte.
Il faut démontrer la faute de l’agent, le préjudice subi, et le lien de causalité entre la faute et le préjudice.
L’agent immobilier rédacteur de l’acte est ainsi tenu d’assurer l’efficacité du compromis de vente. Il se doit notamment de déterminer la nature juridique du bien vendu, et d’indiquer si une mise en copropriété apparaît nécessaire.
En n’indiquant pas aux époux X la nécessité de procéder à une telle mise en copropriété l’agence immobilière a commis une faute.
Cette faute a été retenue par le Tribunal judiciaire de PERPIGNAN, indiquant « il est constant que l’agent immobilier, afin d’assurer l’efficacité de l’acte recherché par les parties, doit, en sa qualité d’intermédiaire professionnel, s’assurer que le vendeur a tout pouvoir pour passer l’acte projeté, sous peine d’engager sa responsabilité délictuelle à l’égard du tiers acquéreur.
Il est constant que le statut juridique du bien vendu, selon qu’il s’agit d’un immeuble en copropriété ou non, conditionne l’efficacité de l’acte.
Il n’est pas discuté que l’agent immobilier connaissait également les lieux. Ainsi, du fait de sa qualité de professionnel de l’immobilier, il ne pouvait ignorer ou aurait dû savoir que le bien relevait du régime de la copropriété, alors même que le notaire, qui n’est pas tenu de se déplacer sur les lieux, s’’est rendu compte de cette difficulté.
L’agence Y ne démontre ni n’allègue d’ailleurs avoir vérifié avant la vente le titre de propriété de l’immeuble et particulièrement son statut juridique.
La société Y qui n’a pas procédé à ces vérifications ni n’a inséré dans l’acte une clause protégeant l’acquéreur, a donc commis une faute engageant sa responsabilité délictuelle à l’égard des demandeurs ».
Quel préjudice a été retenu par la juridiction ?
L’agence immobilière soulevait l’imprudence des propriétaires, et ce pour avoir commandé des menuiseries avant la réitération du compromis.
Cet argument a été écarté par la juridiction.
Le Tribunal a adopté le raisonnement suivant :
« Par ailleurs, il ne peut être retenu que les acquéreurs se sont montrés imprudents en commandant des menuiseries avant même la réitération de la vente par devant notaire, alors qu’ils n’avaient aucune raison de douter de cette réitération, qu’ils avaient les financements nécessaires et qu’ils ont obtenu ces financements permettant la levée de la condition suspensive d’octroi d’un prêt et qu’il n’est allégué en outre aucun obstacle s’opposant à la levée des dites conditions.
Les demandeurs ont donc subi un préjudice, dès lors qu’ils ont commandé en pure perte des menuiseries et se sont trouvés dans l’obligation de payer la commande auprès de la société H qui était ferme et définitive, ce qui n’est pas discuté en défense (…).
En conséquence la requise sera condamnée en réparation du préjudice subi au paiement de la somme de 20.975,36 € ».
L’agence immobilière a par conséquent été condamnée à régler la somme de 20.975,36 €, outre 1200 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.